Chroniques rétro-rôlistes 1 : Stormbringer, voyage dans le multivers de Michael Moorcock.
On est toujours marqué par sa première fois. Pour moi ce fut en 1992, ma première expérience en tant que maîtresse de jeu : une partie improvisée de Stormbringer qui a duré près de 10 heures et qui reste un de mes hauts faits d’armes rôlistiques.
C’est donc avec ce jeu de rôle que je souhaite inaugurer mes Chroniques rétro-rôlistes. Laissez-moi vous entraîner dans l’univers médiéval fantastique sombre et décadent créé par Michael Moorcock.
Bienvenue dans un empire décadent.
L’univers du jeu de rôle Stormbringer est directement inspiré du cycle d’Elric, une série de romans d’héroïque fantasy de l’écrivain anglais Michael Moorcock écrite entre 1961 et 1972.
Le héros, Elric de Melnibonée, est un albinos à la santé fragile jusqu’à ce qu’il trouve Stormbringer, une épée qui, en buvant des âmes, lui redonne de la vigueur.
Dernier empereur de l’Empire de Melnibonée en pleine décadence, il perdra finalement son trône et son grand amour. Cherchant sans cesse à reprendre sa destinée en main, il se rend compte à chaque étape qu’il n’est que le jouet des dieux.
Les Jeunes Royaumes, sous la coupe de Melnibonée, sont en lutte pour se défaire plus ou moins ouvertement de la main mise de cet empire. Mais en filigrane se dessine aussi la lutte entre les Dieux du Chaos, concept de création débridée et perpétuelle et les Dieux de la Loi, représentant la stagnation et l’immobilisme.
Cette série de romans a une esthétique très sombre et flamboyante, qui donne une ambiance assez reconnaissable à l’univers, mais Moorcock y glisse aussi des réflexions politiques et philosophiques. Au moment où les romans sont écrits, l’empire britannique est toujours une grande puissance coloniale mais son pouvoir craque de tous les côtés. L’Empire de Melnibonnée est une représentation à peine caricaturée d’un empire qui oppresse de nombreux peuples, persuadé de sa supériorité sur les autres mais en fait déjà sur le déclin.
Le concept de champion éternel et de multivers.
L’univers de Michael Moorcock a une autre spécificité. Chaque univers qu’il décrit dans ses livres est en fait une facette d’un même multivers. Médiéval fantastique, steampunk, celtique, science-fiction… Quelques personnages vont voyager d’un univers à l’autre. En particulier, il crée le concept de champion éternel. Tous les héros, dans chaque combat, sont en fait un avatar du Champion éternel. Un homme a conscience et souvenir de tous ces combats : Erekosë. Sans cesse, il s’éveille dans la peau d’un nouveau héros partant au combat, avec philosophie, révolte puis désespoir, il incarne à lui seul toute la stupidité et l’inutilité de la guerre.
Elric est aussi, comme une grande partie des personnages de Moorcock, une des incarnations du Champion éternel, destiné à rétablir la Balance entre la Loi et le Chaos dans le multivers.
Jouer dans les jeunes royaumes
Le jeu de rôle, Stormbringer est écrit par Ken St. Andre, également créateur de Tunnels & Trolls et auteur de romans de SF. Il sera publié par Chaosium en anglais en 1981, puis en France en 1989 par Oriflam.
Stormbringer utilise le système de jeu Chaosium, des règles très très simples pour donner toute sa place à l’ambiance et au roleplay sans se prendre la tête avec des chiffres.
Chaque compétence est exprimée en pourcentage, il suffit de lancer un D100 pour savoir si on a réussi une action.
Il faut pas oublier qu’à côté il y avait des jeux hyper simulationnistes comme RôleMaster, Légendes celtiques et JRTM.
Je me souviens de ces jeux complexes, avec des tableaux compliqués pour déterminer quelles conséquences avaient un coup d’une arme à une main contondante en métal sur un bouclier en bois. Dans Stormbringer, rien de tout cela, on lance un D100 chacun et hop, attaque/parade/dégâts et on n’en parle plus.
Tout comme l’œuvre de M. Moorcock est atypique à côté du Seigneur des Anneaux de JRR Tolkien, Stormbringer est un OVNI dans le paysage des jeux de rôle Medfan de l’époque. L’univers est sombre, désespéré, mais aussi plus épique.
Beaucoup d’éléments de l’œuvre de Moorcock se retrouvent dans le jeu et en particulier le questionnement sur la destiné, la liberté de choix de l’individu, sa capacité à changer un avenir tracé pour lui…
L’omniprésence de l’influence des Dieux dans les jeunes royaumes, ainsi que le système de magie spécifique vont dans ce sens. En effet, tout effet magique vient de l’invocation d’une entité magique, liée à un dieu. Dieux du Chaos, de la Loi ou dieux élémentaires.
Je me souviens de débats longs et ardus avec des démons qui ne souhaitaient pas entrer dans une arme et qui cherchaient à négocier des loisirs démoniaques, des âmes ou une certaine ligne de conduite pour accepter de suivre un PJ.
De même, le système de création de personnage, très critiqué et certes contestable pour une bonne expérience de jeu, met en avant l’inégalité des chances lorsqu’on est né descendant d’une nation favorisée, colonisatrice d’une part importante du monde connu, ou dans un bidonville peuplé de mendiants…
Les PJs se retrouvent généralement dans des situations de dépendance où ils devront lutter pour leur libre arbitre, ou accepter d’être manipulés par telle ou telle faction parce que cela sert leurs intérêts ou aspirations.
Postérité…
Après 4 éditions de Stormbringer, Chaosium sort en 1993 Elric ! un nouveau jeu basé sur l’univers de Michael Moorcock. Certains défauts ont été corrigés, comme les inégalités entre les joueurs lors de la création de personnage, et la magie simplifiée.
Le jeu est globalement intéressant mais j’ai vraiment regretté le passage à la liste de sorts au dépend des invocations. Ce qui change réellement l’ambiance du jeu.
En 2001, Chaosium rééditera Elric! sous le nom StormBringer 5th Edition.
Mongoose Publishing, un éditeur britannique a publié en 2007 le jeu Elric of Melniboné, avec un système de jeu tiré de la quatrième édition de RuneQuest. Puis, une 2nde version paraîtra en 2010 sous la forme d’un supplément pour le jeu RuneQuest II.
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Le Département des Sombres Projets a racheté les droits pour la France et publié Mournblade en 2012.
On estime généralement que Bloodlust est directement inspiré de Stormbringer. Créé en 1991 par Croc, ce jeu français permet d’incarner une arme intelligente et son porteur, que l’arme contrôle généralement.
Les illustrations de cet article sont © Oriflam, Chaosium Editions, Mongoose Publishing et Le Département des Sombres Projets
Belle rétro, perso je me familiarise sur mournblade et les romans de elric. Je serai prêt à faire jouer mournblade, j ai mon amie qui joue aussi!
J’ai eu l’occasion de jouer, puis diriger comme role gamemaster la première version.
Le système de création de personnage aléatoire est parfois terrifiant mais quand on a un bon tirage, jouer un weeping waste, un Purple town people, un Tarkeshite, … ça pimente les aventures et ça donne un net avantage au groupe d’aventurier.
Un de mes premiers personnages faisait peur à tout le monde. Mais il était trop plaisant à jouer (un guerrier Oin ambidextre … à la fin de sa carrière, après une campagne qui fit vieillir celui-ci durant 15 ans, à l’aide d’un anneau de hâte et d’être devenu maitre d’arme, il frappait 12 fois par tour. Son surnom: ABADON le hachoir minute).
Un autre de mes premiers personnages, … faisait encore plus peur.
Omen Gren Lern …. Guerrier Noble Assassin Prètre de Goldar … un Pan Tangien d’une intelligence de 26 … oui 260 de QI. Arrogant et hautain qui faisait peur à tout le monde. … Trop génial à jouer.
Certaines races étaient trop géniales à jouer, quand on suivait la description et la présentation des livres de Moorcock.