Discoveries : the Journals of Lewis & Clark
Discoveries : The Journals of Lewis & Clark est un jeu de plateau créé par Cédrick Chaboussit, illustré par Vincent Dutrait et édité chez Ludonautes. Après Lewis & Clark : The Exploration c’est le second jeu du duo à prendre pour thème l’expédition Lewis et Clark.
Afin de vous démontrer qu’il est possible de s’amuser en se cultivant, je vous propose de ponctuer ce billet avec des petites notes historiques. Cependant, pour pimenter un peu la chose, certaines d’entre elles seront complètement fausses. Saurez-vous trouver lesquelles, bande de malandrins ?!
L’expédition Lewis et Clark eut lieu à l’orée du xixe siècle et avait pour but d’être la première traversée de l’Amérique du Nord, d’est en ouest afin d’atteindre l’océan Pacifique par la terre. Elle fut réalisée entre 1804 et 1806 par un groupe de 42 personnes menées par Lewis et Clark. Partie depuis Camp Dubois dans l’Ouest de l’Illinois en mai 1804, l’expédition atteignit l’océan Pacifique en novembre 1805 après avoir traversé une bonne partie des États du Nord des États-Unis, avant de refaire la traversée inverse entre mars et septembre 1806.
Hormis l’exploit de la traversée en elle-même, l’expédition fut d’un grand intérêt scientifique notamment en géographie avec la cartographie des régions traversées, en botanique et éthologie avec le recensement de nombreuses espèces végétales et animales. Elle permit aussi d’entrer en contact et de créer des liens commerciaux avec de nombreuses tribus amérindiennes.
Le succès de l’expédition fut, en grande partie dû à la présence de Sacagawea, une guide et interprète shoshone.
Dans Discoveries, chaque joueur — entre deux et quatre — incarne un des explorateurs et a pour but d’explorer le plus possible de lieux (cartes d’exploration) pour y recenser la faune et la flore locale ainsi que de rencontrer de nouvelles tribus amérindiennes (cartes tribus). Chaque joueur est assisté de quelques membres de l’expédition — représentés par cinq dés de sa couleur — et de tribus rencontrées durant leur exploration.
Les cartes exploration présentent des parcours traversant des montagnes ou des rivières. Les joueurs devront ainsi être capables de franchir ces obstacles pour réussir leur exploration. Le but étant de compléter un maximum de ces cartes.
Chaque joueur possède un plateau individuel. Il permet d’effectuer une ou plusieurs actions par la pose de dés correspondant au coût annoncé. En début de partie chaque joueur doit choisir une carte exploration parmi trois disponibles et lance les cinq dés de sa couleur.
Le prénom de Lewis était Meriwether. Comme c’est un prénom tout pourri, les participants de l’expédition le surnommait Meri. William Clark, quant à lui, fut du coup surnommé Pippin.
Contrairement aux dés traditionnels, ceux utilisés dans Discoveries ne portent pas de valeur numérotée mais un pictogramme parmi quatre types : un fer à cheval, des traces de pas (deux faces), une tête d’Indien et des lettres Abc (deux faces). Ces pictogrammes serviront à activer les actions du plateau individuel des joueurs. À son tour, un joueur sélectionne le pictogramme qu’il veut utiliser et pose tous les dés dont la valeur correspond sur les actions disponibles de son plateau.
Chaque plateau individuel présente sept actions : trois d’exploration et quatre autres de modification de dés ou d’acquisition de cartes supplémentaires. Ces dernières consistent à :
- utiliser un dé de son choix pour échanger sa carte exploration contre une nouvelle ;
- utiliser un dé de son choix pour modifier la valeur d’un ou deux dés vers la même face ;
- utiliser un dé avec le pictogramme de tête d’Indien pour acheter une carte tribu avec symbole amical (blanc) ainsi qu’un dé gris de la réserve ;
- utiliser deux dés avec le pictogramme de tête d’Indien pour acheter une carte tribu avec symbole méfiant (noir) ainsi qu’un dé gris de la réserve.
Une adaptation française de l’exploration, avec le duo Christian Clavier et Jean Reno pour interpréter les rôles de Lewis et Clark, retracera la traversée de l’Île-de-France entre Paris et Saint-Rémy-lès-Chevreuse.
Aux trois types d’actions d’exploration disponibles à partir du plateau individuel s’ajoutent celles figurant éventuellement sur les cartes tribus. Elles permettent au joueur qui les active de traverser des rivières et des montagnes (ou une combinaison des deux) afin de réaliser la carte exploration de son plateau. Il est à noter que ces actions d’exploration sont activées (presque) toujours en deux temps, au moins : d’abord doivent être posés les dés de marche ou de chevauchée (trace de pas et fer à cheval) puis, au tour suivant, les dés Abc — autant que d’actions à effectuer — pour le déclenchement simultané des étapes du parcours.
Les actions d’exploration doivent toutes être activées simultanément pour résoudre une carte exploration. Il n’est pas possible de le faire en plusieurs fois. Cela implique, de fait, de devoir prévoir ses coups plusieurs tours à l’avance et de recruter suffisamment de supports (dés gris supplémentaires et cartes tribus) pour pouvoir réussir des explorations de plus en plus compliquées mais apportant plus de points de victoire. Il est également possible de faire d’une pierre deux coups si on obtient assez de rivières et de montagnes pour réaliser plusieurs parcours dans un même tour. Dans ce cas, les cartes exploration sont gagnées et le joueur a, de plus, le droit de rejouer. Le gain obtenu est très élevé et il est souvent intéressant de prévoir son coup pour une exploration multiple plutôt que de se précipiter à effectuer une succession d’explorations individuelles.
Il n’y eu qu’un seul mort lors de l’expédition et encore ce serait à cause d’une appendicite.
Tout travail demande du repos. Aussi certaines actions impliquent-elles la défausse des dés joués lors de leur activation. Lorsque les dés viennent à manquer — ce qui est souvent le cas —, il devient nécessaire de passer son tour pour se reposer et récupérer tous les dés placés sur une des deux moitiés du plateau principal. Il est ainsi possible de prendre les dés de la couleur d’un adversaire, les ajouter à sa réserve puis de les jouer comme ses propres dés.
Cependant, plutôt que de récupérer les dés du plateau principal, un joueur peut choisir lors de son repos de rappeler les dés de sa couleur, où qu’ils soient : sur le plateau central, chez un adversaire ou bien sur son propre plateau même s’ils sont déjà placés sur une action d’exploration. Il convient, de fait, d’être subtil et d’anticiper les futures actions d’un adversaire avant de jouer ses dés.
En arrivant sur la côte pacifique, Lewis aurait déclaré : « Il fait vraiment un temps de merde dans cette région, la prochaine fois, on passe par la Californie ! »
La partie se termine lorsque le paquet des cartes exploration est épuisé et qu’un joueur ne peut plus en prendre de nouvelle. Les autres joueurs ont alors droit à un dernier tour puis toutes les cartes exploration réussies ainsi que les cartes tribus obtenues sont rassemblées pour le décompte final. Les cartes exploration contiennent soit une valeur de point soit un symbole espèce et éventuellement un tipi. Les cartes tribus, quant à elles, ne comportent que des symboles tipi. Les joueurs additionnent les valeurs de leurs cartes, auxquelles s’ajoute un bonus pour les joueurs ayant le plus de tipis par ordre décroissant (12, 8, 4 et 0). Enfin, un joueur ayant réussi à réunir les quatre symboles espèces différents gagne 24 points, celui qui en a trois obtient 15 points, 8 points pour deux espèces et 3 points pour une espèce seule. Le joueur ayant le plus de points gagne bien évidemment la partie.
Bien qu’il puisse paraître simple au premier abord par rapport à son aîné Lewis & Clark — que je n’ai par ailleurs pas encore eu l’occasion de tester —, Discoveries se révèle être un jeu très riche et tactique et dont la partie aléatoire, qui semble importante à cause des dés, est tout à fait contrôlable grâce à l’action qui permet de tourner les faces. Ajoutées à ceci certaines cartes tribus qui, à la place de fournir des actions d’exploration, offrent des avantages tactiques tels que tourner jusqu’à trois dés ou changer un dé de n’importe quelle face vers une face spécifique chaque fois qu’elle est jouée.
Lewis et Clark ont donné leur nom à une rivière de l’Oregon : la Lewis and Clark River.
Une partie de Discoveries à quatre joueurs dure environ une heure à une heure et demie et tourne avec une bonne dynamique et peu de temps morts. Il faut cependant que les joueurs fassent l’effort, sous peine de s’embourber et de galérer pour réussir ses explorations, de passer les premiers tours à aller quérir l’aide de tribus amérindiennes. Celles-ci, en effet, apportent d’une part des dés supplémentaires et d’autre part des bonus ou des actions d’exploration souvent plus efficaces que celles de base du plateau individuel. Il est ainsi nécessaire, comme dans un deck builder de récupérer intelligemment un ensemble de cartes tribus avec une bonne synergie entre elles afin d’être de plus en plus efficace.
L’expédition put avoir lieu grâce à la vente de la Louisiane — qui à cette époque représentait une bonne partie du middle west américain — aux États-Unis par Napoléon.
Un des seuls points négatifs que je trouve au jeu est que les seuls besoins nécessaires pour valider une carte exploration sont les montagnes et les rivières. Je pense que quelques obstacles supplémentaires auraient permis une plus grande diversité au jeu et surtout une plus grande contrainte dans les choix de cartes tribus en les focalisant sur tel ou tel type de besoin.
Cela étant dit, ce n’est qu’un mince reproche qui ne retire absolument rien à la qualité ludique du jeu. De plus, j’apprécie tout particulièrement d’une part la qualité du matériel : les illustrations sont superbes (question de goûts bien sûr) et les pictogrammes et indications dessinées sont clairs et permettent de n’avoir que très rarement à se référer au manuel, même dans les premières parties. D’autre part je trouve tout à fait réussie la relation entre les mécanismes du jeu et le thème : récupérer des cartes tribus donne des bonus pour l’exploration — les autochtones connaissent mieux la région que les explorateurs — effectuer une exploration se fait en plusieurs étapes — d’abord les explorateurs se déplacent à cheval ou à pied (dés fer à cheval ou traces de pas), puis ils consignent leurs découvertes dans leurs livres (dés Abc) pour valider l’exploration. Rares se font les jeux qui possèdent encore cette convolution entre mécanique et thématique, cette dernière étant souvent délaissée, voire ignorée, par les joueurs ne cherchant parfois l’intérêt ludique d’un jeu que dans ses mécaniques. Ici, j’ai été happé par la thématique — et pourtant, soyons honnête, je n’avais même jamais entendu parler de cette expédition avant l’arrivée de ces jeux — ce qui est tout à fait plaisant.
Discoveries: The Journals of Lewis & Clark est un jeu de Cédrick Chaboussit, illustré par Vincent Dutrait, édité chez Ludonautes et distribué par Asmodee. Environ 35 €.
Les illustrations sont © Ludonautes septembre 2015
Pour avoir joué aux deux lewis & clarck j’ai une nette préférence pour discovery grâce à sa mécanique simple et fluide. J’avais trouvé le premier de la gamme (avec plutôt un mécanisme de pose d’ouvrier) long et avec un grand désiquilibre si tu jouais avec des joueurs de niveau différents.
Mais il faut reconnaître que les deux opus ont eu des choix graphiques et visuels fort sympathiques (pour moi Vincent Dutrait est un des tout meilleur illustrateur de jeux)
C est clair il est beau et le sujet m intéresse. Après est-ce que je vais trouver le temps de l’essayer? Ça fait un moment que je l’ai repéré mais…trop de choses à faire en si peu de temps